Opposition MEDIWELL et WELL & WELL : risque de confusion ?

By Florence Chapin,

Reprise d’un seul élément verbal et appréciation du risque global de confusion, le tribunal de l’UE rend son verdict.

CONTEXTE

Le 5 février 2016, IRF, a effectué la demande d’enregistrement de marque EU ci-dessous en classes 3,4 ,1 et 35.

medi well logo

Le 19 aout 2016 le déposant PHARMADON a fait opposition à cette demande sur la base de ses droits antérieurs sur la marque dénominative WELL AND WELL ainsi que la marque figurative ci-dessous :

well and well logo

Le 3 novembre 2017, le bureau des oppositions a rejeté en totalité cette opposition au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion.

Le 2 janvier 2018, l’opposant a fait appel de cette décision devant l’EUIPO dont la 5ème chambre de recours a, par décision en date du 8 juin 2018, rejeté l’appel.

La Chambre d’appel, après enquête, a considéré que le territoire sur lequel devait être examiné le risque de confusion était la France. Ensuite, en ce qui concerne le public concerné, la Chambre a confirmé que dans le cas présent, le public pertinent se devait d’avoir un niveau d’attention classé de moyen a élevé. Enfin, pour ce qui concerne la comparaison des produits et services, elle a confirmé la position de la division des oppositions, non contestée par les deux parties, à savoir que les signes en cause étaient en partie identiques et en partie similaires.

DECISION

Dans la décision contestée, la chambre de recours a considéré que l’élément « medi » avait un caractère dominant dans la marque, bien que l’élément « medi » ne puisse être écarté.

Concernant l’élément « well » la Chambre, contrairement au bureau des oppositions, a considéré qu’au moins une partie du public pertinent pouvait le comprendre comme un mot anglais signifiant « bien » et qu’en conséquence il avait un faible caractère distinctif au regard des produits concernés.

La Chambre a ensuite considéré que le mot « medi » pouvait être perçu comme une abréviation du mot « médecine » et par conséquent, descriptif pour les produits des classes 5 et 10 et aux services de la classe 35 liés à ces produits.

La chambre en est venue à considérer que les signes en cause avaient un faible niveau de similarité phonétique et visuelle.

Pour la partie du public qui comprenait l’élément « medi », les signes étaient conceptuellement différents.

En ce qui concerne la marque figurative antérieure, elle devait être considérée encore plus différente car elle comprenait un élément figuratif et un élément dénominatif.

La Chambre de recours a donc écarté le risque de confusion entre les signes.

A l’appui de son action devant le Tribunal, l’opposant a argué que la chambre des recours avait analysé de manière erronée les marques en cause et par la même le risque de confusion.

L’opposant maintient que la chambre des recours a analysé le niveau d’attention du public essentiellement en relation avec les produits pharmaceutiques et d’usage médical et n’a pas pris en considération le fait que la vente en gros et au détail de certains produits de la classe 3 se faisaient sur internet.

En conséquence, les produits concernent l’ensemble du public qui a un niveau d’attention « moyen », plutôt que « élevé ».

Etant donné la nature des produits et services pris dans leur ensemble, la Chambre de recours a considéré qu’ils visaient à la fois l’ensemble du public et les professionnels avec une connaissance et attention particulière.

En ce qui concerne la structure des signes et leur comparaison, l’opposant, considère que le terme « well » qui ne fait pas partie du vocabulaire français est tout à fait distinctif et que la Chambre des Recours n’aurait pas dû faire une distinction entre le public qui comprend ce terme et celui pour lequel ce terme n’a aucune signification. De plus pour certains services de la classe 35, le terme « medi » n’est pas distinctif et enfin « well » constitue le seul élément intrinsèquement distinctif de la marque en cause.

Le tribunal a considéré que le public pertinent est constitué du public général et des professionnels de la santé qui ont une bonne connaissance de l’anglais et peuvent donc facilement comprendre la signification de certains mots, communs dans toutes les langues, comme c’est le cas pour l’élément verbal « well »

Le Tribunal a note ce qui suit :

Le terme « well » pouvait renvoyer au concept de « bien-être » [arrêt du 15 décembre 2016, Redpur/EUIPO – Redwell Manufaktur (Redpur), T‑227/15, non publié, EU:T:2016:745, point 49]. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que, pour cette partie du public pertinent, l’élément verbal « well » présentait un caractère distinctif faible alors que, pour le public qui ne comprenait pas l’anglais, il avait un caractère distinctif normal.

En ce qui concerne la distinctivité du terme « medi », la Chambre des Recours a considéré que ce terme est une abréviation du mot « médecine » et qu’il constitue la racine ou la base de nombreux mots liés au domaine médical. En conséquence cet élément verbal est considéré descriptif. Le tribunal a noté que la Chambre des Recours, après avoir considéré que les deux marques en cause partageait le même élément « well » s’est attaché à effectuer une analyse spécifique de leurs différences. En particulier, il a noté que les deux marques en cause diffèrent, d’abord en raison de la répétition de l’élément « well » et de la présence de l’élément « and » et ensuite en raison de la présence de l’élément « medi » qui est dominant dans la demandé contestée, de même que l’élément figuratif de la demande à savoir la stylisation du signe et la couleur bleue.

La Chambre a considéré que puisque le public pertinent est généralement plus attentif à la première partie d’une marque, il était amené à conclure que, en raison de ces différences, les marques en cause, avaient une faible similarité.

Au surplus, la Chambre des Recours a considéré que si les deux marques en cause, avaient du fait de la présence de l’élément commun « well » une certaine proximité phonétique, elles différaient cependant en raison de l’existence dans chacune d’entre elles d’éléments supplémentaires. En particulier, elle a considéré que la marque opposée serait prononcée « medi well » alors que la marque antérieure serait prononcée « well and well ».

En ce qui concerne l’analyse effectuée sur la marque nationale antérieure figurative, l’opposant argue que la Chambre des Recours n’a pas suffisamment analysé l’opposition au regard de cette mémé marque antérieure.

Cependant d’après la Chambre des Recours la marque française antérieure n’est pas similaire car elle inclut des éléments verbaux et figuratifs qui ne sont pas présents dans la demandé contestée.

Le tribunal a jugé que ce raisonnement, même succinct, a cependant souligné le fait que la marque figurative en question différait de la marque antérieure verbale, pour laquelle la Chambre des Recours s’était livrée à une analyse détaillée des différents éléments.

Enfin l’opposant maintient que la Chambre des Recours a attaché un poids trop important à la partie initiale de la marque en ce qu’elle constitue seulement un « préfixe descriptif ». Puisque l’élément « medi » est juxtaposé à un préfixe, la chambre des recours s’est trompée en déclarant que « l’élément commun était placé à la fin du signe contesté ».

D’après l’opposant, la Chambre des Recours aurait dû déclarer qu’il existait un risque de confusion.

Le tribunal a considéré que le faible degré de similitudes visuelles, conceptuelles et visuelles, lié à la présence de l’élément commun « well » ne compensait les différences caractérisant les signes en cause.

Le Tribunal a par conséquent rejeté l’action dans son intégralité, considérant que les différences entre les marques étaient suffisantes pour écarter tout risque de confusion entre elles.

COMMENTAIRE

Ce jugement doit servir de rappel au principe de base qui est que le risque de confusion doit être « apprécié » globalement et que la simple reprise d’un signe ne suffit pas nécessairement à constituer un risque de confusion.

Les titulaires de marques doivent aussi garder à l’esprit que, avant d’engager une action, il est essentiel d’analyser la force de leur marque et la distinctivité de chacun des éléments qui la composent

Florence Chapin, Conseil en Propriété Industrielle en Marques, Dessins & Modèles, à Novagraaf Bordeaux

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