Quatrième acte pour la loi chinoise relative aux marques

Face à un nombre toujours plus important de contrefaçons et de dépôts frauduleux de marques en Chine, le Gouvernement chinois souhaite instaurer un climat favorable aux investissements et aux innovations en durcissant sa législation relative aux marques.

La révision de la loi relative aux marques datant de 1982 a été annoncée le 2 avril 2018, laissant place aux consultations publiques. Le 23 avril dernier, le Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale chinoise a approuvé la quatrième révision de cette loi, dont les nouvelles dispositions prendront effet le 1er novembre prochain.

Face à la place commerciale centrale et grandissante du marché chinois, le Comité a estimé qu’il était nécessaire de réviser huit de ses lois - parmi lesquelles celle relative aux marques - dans le cadre de la mise en œuvre de la loi sur l’investissement étranger. En effet, la Chine est aujourd’hui le pays comptabilisant le plus de demandes d’enregistrement de marques, témoignant de la valeur croissante de ces dernières et de la place stratégique de cet Etat pour les dépôts de marques.

La troisième révision de la loi en 2013 s’inscrivait déjà dans le cadre d’une politique de lutte contre les enregistrements frauduleux en prévoyant expressément le principe de bonne foi par l’interdiction de l’enregistrement de marques déposées en violation de ce principe. Cette interdiction visait essentiellement les dépôts préemptifs de marques étrangères par certains déposants opportunistes. Néanmoins, l’impact de cette disposition restait incertain en ce que le dépôt de mauvaise foi ne constituait pas un motif légal d’opposition, de sorte qu’il n’était pas possible de se fonder sur la seule mauvaise foi du déposant afin de s’opposer au dépôt d’une marque.

La quatrième révision s’inscrit dans cette même volonté de lutte contre les enregistrements de mauvaise foi, cette fois-ci en allant plus loin, en introduisant la notion de dépôt frauduleux ou dépôt malveillant. Cette notion concerne des dépôts de marques effectués sans intention de l’utiliser, bloquant alors la possibilité d’un dépôt par un tiers souhaitant commercialiser ses produits ou services sous cette marque chinoise (phénomène autrement connu sous le nom de trademark squatting). Toutefois, le dépôt frauduleux n’est pas expressément défini par la loi, rendant son appréciation subjective. Pourtant, dans ses recommandations, l’International Trademark Association (INTA) insistait sur la nécessité d’une clarification de la notion. A défaut de précisions et de critères objectifs, l’Office chinois se fonde généralement sur la notoriété d’une marque déposée dans un autre pays, ou encore sur les relations d’affaires entre les deux parties, voire plus largement sur un passif contractuel entre ces dernières.

L’introduction de la notion de dépôt frauduleux ou malveillant constitue désormais un motif de rejet d’un enregistrement, d’une opposition ou encore d’une action en invalidation de la marque litigieuse, témoignant d’une réelle avancée par rapport à la troisième révision.

Enfin, la lutte contre les dépôts malveillants s’effectue aussi a posteriori par l’application de sanctions. Des sanctions administratives pourront effectivement être prononcées, comme des avertissements ou des amendes. Aussi, le montant maximum des compensations décidées par la Cour a augmenté, passant de 3 000 000RMB à 5 000 000RMB (soit de 390 000 euros à 650 000 euros). Ce montant avait déjà été fortement rehaussé par la troisième révision, de 500 000RMB à 3 000 000RMB (soit de 65 000 euros à 390 000 euros). Toutefois selon la loi, la destruction des produits contrefaits reste à privilégier face à une compensation financière, dans le but d’empêcher l’introduction sur le marché de ces produits et matériaux utilisés pour leur fabrication.

L’avenir nous dira si ce nouvel arsenal garantit une lutte effective et suffisante contre le trademark squatting, ou si une cinquième révision sera nécessaire afin d’éradiquer ce phénomène.

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