Le brexit sous un autre angle : Noms de domaine et ânes
Le Brexit fait encore parler de lui, cette fois sous un angle un peu différent qui mérite qu’on s’y attarde pendant quelques lignes. En effet, « Brexit Party » a été déposé par un groupe anti-brexit appelé « Led by Donkeys », causant ainsi colère et embarras de Nigel Farage.
Le « Brexit Party », fondé en novembre 2018 et actif depuis janvier 2019 sous la direction de Nigel Farage, a tenté de bien faire les choses pour protéger son nom, par le dépôt des marques THE BREXIT PARTY BREXIT PARTY le 25 juin 2019 puis le 27 juin 2019.
Une protection qui arrive trop tard.
Il exploite également un site internet sur le nom de domaine <thebrexitparty.org>, enregistré le 20 janvier 2019, sur lequel les idées et propositions du parti sont publiées.
Mais cette protection est arrivée trop tard, puisque dès le 26 octobre 2018, une personne ou un groupe de personnes bien inspirée(s), se présentant sous le nom explicite « Led by donkeys » a enregistré le nom de domaine <thebrexitparty.com>. Précisons que la presse britannique mentionnait déjà, fin septembre 2018, un parti du Brexit, donnant de bonnes idées aux détracteurs du Brexit.
Il semblerait que le nom de domaine en .com ait été initialement enregistré en août 2016 par le UK Independent Party (UKIP), que Nigel Farage dirigeait jusqu’en juillet 2016 - cf copie de l’historique du WHOIS :
Un enregistrement en toute mauvaise foi, mais un enregistrement quand même...
Le nom de domaine a vraisemblablement été abandonné, permettant à son titulaire actuel de le reprendre à son nom et forçant le Brexit Party à se contenter du nom de domaine en .org.
L’affaire pourrait s’arrêter là, mais le nom de domaine litigieux est loin d’être inactif. Au contraire, il porte un site anti-Brexit, très critique à l’encontre de Nigel Farage et de son parti. En effet, sur le site archive.org, on peut voir qu’en avril 2019, Led by Donkeys avait détourné le logo du Brexit Party, et largement critiqué le parti et son meneur.
Le Brexit Party (le vrai), a bien entendu tenté de récupérer le nom de domaine, mais comme n’ont pas manqué de le lui rappeler les cybersquatteurs, le nom litigieux est antérieur aux droits dont pourrait tenter de se prévaloir le Brexit Party. Bons princes, ils proposent tout de même de le lui céder pour un montant dépassant le million de livres, somme qui serait, d’après le site, destinée à financer une organisation de soutien aux migrants :
Le site https://thebrexitparty.com ne contient désormais plus de référence aux logos du Brexit Party, mais continue ses critiques à l’encontre de l’homme politique et de son parti, sous la forme actuellement d’un calendrier de l’Avent des mauvaises surprises que le Brexit réserverait aux britanniques, et reprenant des vidéos de Nigel Farage.
Vous vous demandez pourquoi cette situation dure ainsi depuis des mois, sans que le Brexit Party ne parvienne à récupérer le nom et faire fermer le site ?
Mauvais timing
Il est vrai que nous sommes à l’évidence face à un cas d’enregistrement et d’usage du nom de domaine <thebrexitparty.com> de mauvaise foi et sans intérêt légitime. Toutefois, faute de droits antérieurs, le Brexit Party pourra difficilement justifier une plainte UDRP (procédure de résolution des litiges permettant d’obtenir l’abandon ou le transfert du nom de domaine au plaignant).
En effet, le UKIP et le Brexit Party sont deux entités distinctes et le second ne devrait donc pas pouvoir se prévaloir de l’enregistrement antérieur du nom litigieux par le premier.
Pour autant, c’est bien Nigel Farage le dénominateur commun et peut être pourrait-il envisager une plainte commune par le Brexit Party et le UKIP ? Par ailleurs, d’autres voies que l’UDRP sont ouvertes pour faire cesser les atteintes, notamment la voie judiciaire, qui permet une appréciation plus large de tous les faits liés à l’affaire. Cette voie paraît d’autant plus appropriée qu’outre un cas de cybersquatting, nous sommes face à des propos diffamatoires.
Affaire à suivre !
Ne faîtes pas la même erreur !
Profitons-en pour rappeler aux titulaires de marques que leur portefeuille de noms de domaine doit être géré en cohérence et harmonie avec leur portefeuille de marques, et ces deux types d’actifs immatériels ne peuvent pas être totalement décorrélés, afin d’éviter l’abandon par omission de noms de domaine stratégiques.
En outre, les noms de domaine dans les extensions principales doivent être sécurisés au plus tôt, avant toute communication publique sur le projet, et donc avant même le dépôt de marque puisque ce dernier fera l’objet d’une publication.
Si vous avez un projet, contactez au plus tôt votre conseil en propriété industrielle pour mettre en place avec lui la meilleure stratégie de sécurisation du nom.
Si vous avez des questions, n'hésitez pas à contacter votre conseil habituel ou à envoyer un mail à tm.fr@novagraaf.com